Le Professeur Gilles Aulagner, président des Entretiens de Galien reçu par Agnès Firmin-Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la Santé et de la Prévention , chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé.
Compte rendu d'audience, mercredi 16 novembre 2022 (10h30 - 11h50)
A l'occasion de l'organisation des Entretiens de Galien à Lyon en novembre dernier, madame la Ministre avait fait l'honneur d'une intervention à distance sur les sujets importants relatifs à l'activité des pharmaciens tant officinaux qu'hospitaliers.
A la suite de cet évènement, le Professeur Aulagner, accompagné d'une délégation de représentants de la profession, a eu l'honneur d'être reçu par Madame la Ministre afin d'évoquer différents points cruciaux au devenir de la pharmacie et de ses usagers.
La discussion a portée sur les thèmes principaux de la démographie pharmaceutique, de l'évolution du 3e cycle des études de pharmacie, du financement de l'informatisation du circuit des produits de santé, et de la territorialité
Etaient présents, Mme la Ministre Dr Agnès Firmin-Le Bodo, Dr Sophie Augros, conseillère médicale auprès de la ministre, le Pr Gilles Aulagner, président des Entretiens de Galien, le Doyen Claude Dussart directeur de l'Institut des sciences pharmaceutiques et biologie (ISPB), Dr Olivier Rozaire, président de l'Union régionale des professionnels de santé infirmiers libéraux Auvergne Rhône- Alpes (URPS AURA), le Doyen Jean-Louis Beaudeux, président de l'Académie nationale de Pharmacie. Au nom de la délégation, le Pr Gilles Aulagner remercie Madame la Ministre pour son accueil et expose les principaux points qu'il souhaiterait voir évoquer lors de cet entretien.
Démographie pharmaceutique :
Le Pr G. Aulagner rappelle qu'il manque de 16 à 18 000 pharmaciens dans différents secteurs d'activité, notamment 15 000 en officine et 1 500 à l'hôpital.
Une augmentation de la capacité nationale des formations universitaires va devoir intervenir.
La problématique du déficit d'entrée d'étudiants en 2e année des études de pharmacie (DFGSP2) va amplifier, au moins temporairement, la pénurie de pharmaciens dans les années à venir. En effet, la réforme de l'Entrée dans les Etudes de Santé (REES), deux années après sa mise en place, a conduit à laisser vacantes plus de 1100 places en DFGSP2 soit près de 30% de places offertes au niveau national. De toute évidence, les modèles « PASS/LAS » et « tout LAS » nécessitent des adaptations, à mettre en œuvre le plus rapidement possible. En effet, si la filière Maïeutique est également touchée dès cette année, les filières Médecine et Odontologie le seront probablement très prochainement. La Conférence de Doyens de Pharmacie prépare des propositions qui s'inscrivent dans l'esprit de la REES mais qui
permettent de faciliter un recrutement visible et équitable : en premier lieu, l'inscription des filières (pour notre cas, Pharmacie) dans Parcoursup est impérative, alors qu'à ce jour, seul le parcours santé PSS/LAS est affiché pour les lycéens.
Concernant l'exercice professionnel et le déficit de pharmaciens d'officine, une mesure sera de limiter voire interdire l'intérim des pharmaciens, qui génère une distorsion salariale importante, limite les installations et ne permet pas la pleine réalisation des missions officinales.
Le Dr O. Rozaire indique que les obligations de diplômes au sein des officines se heurtent à une difficulté majeure de recrutements d'adjoints. Indiquant qu'il ne peut y avoir de sanctions compréhensible dans le contexte actuel.
Le déficit de préparateurs en pharmacie est également évoqué. L'universitarisation récente de la formation (DEUST en remplacement du BP actuel) doit accroître l'attractivité de la profession (maintenant visible dans Parcoursup), le niveau de connaissances et de compétences des préparateurs dans l'avenir. Le DEUST de préparateur/technicien en pharmacie a été mis en place dès 2021-2022. La première promotion des diplômés du DEUST sortira en 2023. Il est important que ce diplôme leur permette réglementairement l'exercice de préparateur en officine, ce qui n'est pas encore le cas.
Par ailleurs, une option de formation complémentaire d'une année à l'issue du DEUST permettrait d'assurer une spécialisation en milieu hospitalier (déjà existante), en milieu industriel ou en officine. Dans ce dernier cas, le préparateur/technicien spécialisé en pharmacie se verrait confier, après acquisition de connaissances/compétences supplémentaires, de nouvelles missions par délégation du pharmacien, et toujours sous son autorité.
Cette troisième année d'études permettrait de plus un accès au niveau Licence, autorisant une poursuite d'études universitaires (Master ou même études de Pharmacie) et harmoniserait la formation française de préparateur en pharmacie au niveau européen, améliorant ainsi la mobilité de nos diplômés.
Mme la Ministre exprime la réticence du ministère à créer des exercices officinaux de pratique intermédiaires entre le préparateur en pharmacie titulaire du DEUST et le pharmacien.
Evolution du 3e cycle des études de pharmacie :
DES de pharmacie hospitalière : il est nécessaire de corriger un oubli dans l'arrêté du 25/09/2021, qui n'exige pas d'être titulaire du DES de pharmacie hospitalière pour présenter le concours de PH en pharmacie hospitalière (Cf. document joint).
DES de biologie médicale : l'accès des internes de formation pharmaceutique aux formations spécialisées transversales (FST) clinico-biologiques est apprécié. Il doit être associé à une égalité des droits liés à l'acquisition de la FST, par exemple le suivi de patients, au même titre que les internes de formation médicale.
DES de pharmacie d'officine : l'application du rapport de la Conférence des Doyens de pharmacie (B. Décaudin, B. Muller, 2021, remit lors de l'entrevue) doit permettre d'augmenter les compétences des futurs pharmaciens officinaux en pharmacie clinique, et de constituer une base de recrutement d'enseignements contractuels de pharmacie générale (par analogie avec les enseignants de médecine générale). Cela permettra de renforcer le nombre et le ratio d'enseignants-pharmaciens dans les facultés de pharmacie. Il est rappelé que la pharmacie est la seule discipline de santé où les enseignants sont majoritairement non pharmaciens : face à cette situation, il est indispensable d'augmenter sensiblement le nombre de praticiens pharmaciens bi-appartenant et d'enseignants associés notamment officinaux dans les facultés de pharmacie.
DES de pharmacie industrielle : il s'agit de la même actualisation du 3e cycle des études de pharmacie que pour la filière Officine avec le DES de pharmacie officinale. Il sera important d'avoir une mise en place simultanée des deux DES.
Développement professionnel continu (DPC) : les intervenants rappellent les difficultés rencontrées avec l'OGDPC, et la complexité du système actuel. Il est indiqué à Madame la Ministre que la formation à la vaccination n'est plus agréée DPC pour un pharmacien diplômé depuis 5 ans qui n'a pas été encore agréé. Le cas se produit notamment pour les pharmaciens en industrie qui décident de se consacrer à l'exercice officinal, or il faut un numéro d'agrément DPC pour que les ARS autorisent un pharmacien à pratiquer la vaccination.
Le Pr G. Aulagner demande par ailleurs la création de trois Collèges de DPC pour la pharmacie pour seulement un actuellement : Officine, hôpital, industrie, et de mettre en place rapidement un groupe de travail pour fixer les modes de fonctionnements.
Points divers :
Financement de l'informatisation du circuit des produits de santé (ville et hôpital) dans le cadre de
« Ségur ». Ce financement n'a pas été prévu, alors qu'il est essentiel pour la traçabilité des produits de santé.
Territorialité : le Pr J.-L. Beaudeux indique qu'une des pistes de maintien du service de proximité de la biologie médicale, actuellement très restructurée en chaînes de laboratoires et maintenant aux mains de grands groupes financiers, pourrait être garantie par une exigence de couverture et maillage de tout le territoire national, qui évitera ainsi l'extension de déserts biologiques qui existent déjà.
Madame la Ministre conclut la réunion en précisant qu'un dossier essentiel pour elle, sera la santé des professionnels de santé, les pharmaciens en particulier.
Créés par le Professeur Gilles Aulagner, président honoraire de l’ Académie nationale de pharmacie, les « Entretiens de Galien » sont organisés annuellement et conçus par des pharmaciens pour tous les pharmaciens (libéraux-hospitaliers-industriels) avec la réunion de tous les acteurs de la pharmacie à Lyon, ville au cœur du secteur de la Santé. L’excellence des intervenants et la pertinence du programme qui est défini selon les préoccupations de chaque branche, assure des débats et des échanges de haut niveau. L’objectif est d’apporter aux pharmaciens des informations de références en matière d’actualités scientifiques et économiques. Les résultats attendus sont l’enrichissement des connaissances scientifiques, le partage des idées et des expériences, la fédération des participants autour d’un moment commun, développement de relations
Suivez l'actualité de l'emploi et de la formation dans le secteur des métiers de le santé, du social et des SAP