L'hospitalisation privée regroupe 35 000 médecins libéraux et 170 000 salariés qui travaillent chaque année et prennent en charge 9 millions de patients.
Dans un contexte où la santé est l'une des premières préoccupations des Français, les dirigeants des trois premiers groupes de santé français, accompagnés des représentants de leurs communautés médicales, alertent sur les conséquences particulièrement graves du gel des financements accordés aux hôpitaux privés annoncé par le Gouvernement. Concrètement, alors que l'inflation des charges des hôpitaux privés va pour la troisième année consécutive, être particulièrement forte en 2024 (4 %), le Gouvernement a décidé, au mépris de toute concertation, de ne pas augmenter leurs ressources, et au contraire d'augmenter fortement celles de l'hôpital public (+4,3%).
D'apparence technique, cette décision aura des conséquences extrêmement graves pour les hôpitaux privés, qui sont pris en étau entre des charges qui explosent depuis 2022 et des tarifs qui sont volontairement sous-calibrés par le Gouvernement. La part d'hôpitaux privés en déficit, qui est passée de 10 à 40 % entre 2019 et 2023, atteindra dans ces conditions le niveau alarmant de plus de 60 % en 2024. Certaines activités seront particulièrement impactées. A titre d'exemple, 73 % des services d'urgences seront déficitaires l'année prochaine.
Cette décision est en totale contradiction avec le rôle sanitaire de l'hospitalisation privée, qui est une composante cruciale de notre système de santé, à côté et en complément de l'hospitalisation publique. Elle assume désormais plus de la moitié de la chirurgie en France, 40 % de la chirurgie du cancer, 35 % des chimiothérapies, 25 % des soins palliatifs ou encore plus de 50 % de la radiothérapie. Présente dans 90 départements en France, l'hospitalisation privée est un acteur essentiel de l'accès aux soins, avec un niveau de qualité certifié par la Haute Autorité de Santé supérieur à la moyenne. Dans de nombreux départements confrontés à la pénurie de médecins et de soignants, elle est le gage de la lutte contre les déserts médicaux et du maintien d'une réponse de proximité en matière de soins. Et c'est l'hospitalisation privée qui tire l'offre de soins et a permis de commencer à résorber la dette de 3,5 millions de séjours hospitaliers non réalisés pendant le COVID. Si l'hospitalisation privée avait eu la même croissance que celle du public, cette dette n'aurait pas baissé, mais aurait au contraire atteint près de 4 millions de séjours en attente.
« Nous sommes ici aujourd'hui pour contester une décision grave qui va affaiblir l'ensemble du système hospitalier français. Cette prise de parole inédite marque un moment historique, car l'heure est grave. Si nous prenons cette initiative, c'est parce que la sidération s'est installée dans les plus de 1 000 hôpitaux privés. Nous sommes sonnés, sous le choc » déclare Pascal Roché, directeur général de RAMSAY SANTE.
« Cette décision est un point de bascule qui condamne les patients à ne pas bénéficier des soins qu'ils méritent. Quelle que soit leur pathologie, leurs délais de prise en charge seront rallongés, ils devront aller encore plus loin pour se faire soigner. Et c'est du mépris face à l'engagement quotidien des équipes soignantes » Pr Patrick Jourdain, cardiologue et directeur médical RAMSAY SANTE.
Une décision grave aux conséquences dramatiques
Pour la première fois dans l'histoire de l'hospitalisation privée, les dirigeants des trois premiers groupes (ELSAN, Ramsay Santé et Vivalto Santé), qui représentent 5 millions de patients pris en charge chaque année, ont tenu une conférence de presse commune, accompagnés des médecins représentant leurs trois communautés médicales. Leur prise de parole commune symbolise l'unité et la détermination de milliers de professionnels de santé, qui sont profondément choqués par cette annonce gouvernementale et ses conséquences dramatiques pour les patients et les soignants.
« Cette décision porte en elle des conséquences désastreuses pour l'accès aux soins en France car elle va affaiblir considérablement l'hospitalisation privée. En affaiblissant l'hospitalisation privée, c'est tout le système de santé qu'on affaiblit. Ceux qui vont en supporter les conséquences, et très rapidement, ce sont les patients » déclare Sébastien Proto, président exécutif d'ELSAN.
« Il faut casser les idées reçues : dans certains territoires et particulièrement les plus fragiles, nos établissements reçoivent davantage de patients qui vivent avec les minimas sociaux que l'hôpital public » Olivier Jourdain, Gynécologue-obstétricien, président de la commission médicale nationale des établissements ELSAN.
Concrètement, le gel des tarifs et le basculement de plus de 60 % des établissements privés dans le déficit entraîneront une diminution de l'accès aux soins, sous l'effet notamment de fermetures d'activité et des restructurations qu'entrainera obligatoirement une telle situation financière du secteur. Alors que la France a besoin d'une hospitalisation privée forte pour répondre aux besoins de santé croissants en raison du vieillissement démographique et compenser la reprise d'activité plus faible de l'hospitalisation publique, les décisions du Gouvernement produiront l'effet exactement inverse. Dans les territoires, cela conduira à des listes d'attente encore plus importante, à multiplier les renoncements aux soins et à renforcer les déserts médicaux.
Le sous-financement de l'hospitalisation privée décidé par le Gouvernement réduira par ailleurs la capacité d'investissement du secteur, au détriment là encore des patients. Les acteurs de l'hospitalisation privée investissaient jusqu'à présent chaque année 1 milliard d'euros dans la modernisation des équipements, dans la technologie médicale, dans l'innovation des prises en charge. Maintenir ces investissements, qui ont joué ces dernières années un rôle décisif pour moderniser le secteur hospitalier privé, ne sera désormais plus possible.
Enfin en affaiblissant le rôle de l'hospitalisation privée, le Gouvernement affaiblit le premier contributeur à l'efficience globale du système de santé. Les actes réalisés dans le privé coûtent en effet moins cher à la collectivité que ceux réalisés dans le public. À titre d'exemple, un cancer des voies digestives coûte à l'Etat 33% de moins quand il est opéré dans le privé que le même patient opéré dans le public. Alors que la contrainte de finances publiques n'a jamais été aussi forte, les pouvoirs publics se privent ainsi d'un levier d'efficacité considérable.
Le Gouvernement doit d'urgence revoir sa copie
Face à cette situation critique, les trois principaux acteurs du secteur hospitalier privé en France se mobilisent et appellent le Gouvernement à revoir d'urgence sa copie. Des demandes claires et pragmatiques ont été formulées au Gouvernement en proposant une hausse des financements de 3% (au lieu des 0,3% annoncés hier), un montant qui est totalement compatible avec les financements votés par le Parlement pour l'année 2024 (ONDAM).
« Ce que nous demandons au Gouvernement, au Premier ministre, c'est la reconnaissance de la réalité de notre activité et de notre efficience. J'ai consacré́ ma carrière au secteur hospitalier, et je n'ai jamais vu une telle différence de traitement entre le public et le privé. Nous avons alerté nos institutions sur les erreurs d'analyse et les conséquences graves qui en découlent, mais sans obtenir de retour. Nous demandons une révision du financement » Daniel Caille, président et fondateur du groupe VIVALTO SANTE.
« Un mépris institutionnel s'est installé́. Le Gouvernement a décidé qu'il y avait des bons et des méchants et nous sommes les méchants. » François-Bruno Le Bot, Chirurgien, président de comité médical VIVALTO SANTE
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